San Stephano

On prend les soupes

Écrit par Marc pour le .

Pas fâchés de quitter l’hôtel. Unanimement, la préférence va aux nuits sous tente ! Nous quittons Карнобат (Karnobat) et nous devons emprunter la route nationale qui grimpe sérieusement. Pas optimal pour s’échauffer, mais une fois arrivés au sommet, il nous reste à dégringoler vers notre lieu de repas, un petit parc dans un petit village à côté d’un petit café. Le printemps fait pousser fort les herbes et les enfants sont ravis et jouent avec. Les parents en cueillent quelques-unes et les ajoutent à la salade… miam ! Il y a notamment du mouron blanc ou mouron des oiseaux. Nous connaissons bien cette plante qui, en plus d’agrémenter la salade, est une bio-indicatrice d’un sol équilibré. Là où elle pousse en profusion, cela signifie que le sol est en bonne santé. Et ici le mouron est magnifique !

Vallons noirs

Nous poursuivons tranquillement sur ces routes vallonnées. Nous observons ici encore d’immenses champs de monoculture. Pas d’arbres, pas de haies, juste de la grande culture. Ce qui nous frappe ici c’est la couleur de la terre. Elle est noire. C’est très certainement le signe qu’elle est très riche en matière organique carbonée, contrairement à la terre de chez nous où il ne reste presque plus de carbone dans les sols agricoles. Pourquoi la terre est-elle encore si noire ici, nous l’ignorons, peut-être l’agriculture industrielle est-elle arrivée plus tardivement qu’ailleurs…

Sur ces réflexions, nous arrivons à Сан-Стефано (San Stephano). Nous avons repéré un étang sur la carte, cela devrait nous permettre d’y planter la tente. Nous faisons une petite pause à l’entrée du chemin qui y mène, admirant les cigognes dans leur nid.

Une petite fille pétillante sort d’une maison, son grand-père suit. Nous échangeons quelques mots. Puis c’est le tour du papa, puis de la maman et nous voilà assis à une table devant une tasse de café, un bol de soupe, quelques biscuits, des petits beignets fait maison… La petite fille joyeuse s’appelle Nadia et ses parents sont Dimitar et Ljudmila. Nous discutons par traducteur interposé, ce qui ne simplifie pas le dialogue, mais le permet et c’est déjà formidable ! Ils habitent à Karnobat et viennent dans cette maison le weekend ou durant les vacances. Un grand jardin potager / verger occupe et nourrit toute la famille.

Nous apprenons que le village comptait 1500 habitants et qu’il n’en reste qu’une cinquantaine. Les maisons s’effondrent, les magasins sont fermés ou moribonds. Dans la discussion reviennent des mots comme Euro ou Europe, sans que je ressente une hostilité, je perçois de l’inquiétude et peut-être de la tristesse. Nous repartons de chez nos hôtes avec de la confiture de framboise maison, du poisson et d’autres merveilles pour nos papilles…

Au bord de l’étang

La nuit au bord de l’étang nous repose vraiment. Nous nous rappelons avec Estelle qu’il y a un an, manger au sol était plus difficile et que nos corps se sont habitués à être assis par terre sur notre couverture.

Nous rebroussons le chemin emprunté la veille pour rejoindre notre route du jour. La fontaine de San Stephano nous arrête, remplissage de gourdes, vaisselle, jeux pour les enfants et observation de la flore et de la faune…

Cette pause après moins d’un kilomètre s’étire un peu et voilà une voiture qui s’arrête. En sortent Ponka et Zatcho. Ponka s’émerveille devant notre attirail et notre histoire, nous devons absolument aller boire un café chez lui, un peu plus loin. Allez.

Chez Ponka

Nous prenons donc nos vélos et suivons sa voiture pour parcourir quelques centaines de mètres de plus. C’est à ce moment que Léon remarque que sa roue arrière est crevée. Beau timing. Cette pause nous permettra de réparer la fuite. Arrivé chez Ponka, nous nous voyons proposer une excellente soupe. Du schnaps maison ? Non, nous allons rouler ensuite, boire de l’alcool avant de faire du vélo, ce n’est jamais une bonne idée ! Mais vous allez dormir ici ce soir ! Mais il est 11h et nous avons fait 1,6km, nous allons bientôt reprendre la route…

La discussion est amusante, elle se fait avec quelques mots d’anglais, d’allemand et en bulgare grace aux traducteurs.

Je répare la fuite. Je vérifie que tout va bien. Parfait. J’attend suffisamment avant de regonfler. Le long clou que j’ai enlevé du pneu a traversé la bande anti-crevaison des fameux pneus Marathon Plus bien connus des voyageurs. Je regonfle et voilà. Le temps de boire mon café et nous pourrons repartir. Lorsque je ressors, le pneu est à nouveau à plat. Je re-démonte la roue. Ma réparation a bien tenu, c’est à côté que ça fuit. Pourtant le pneu est bien lisse… mystère. Je re-répare. Je re-vérifie. Ah, ça fuit encore juste après, mais ça ne fuyait pas tout à l’heure ! La chambre à air doit être fragilisée. Je n’ai pas d’autre chambre à air pour les roues de Léon, il m’en faudrait une autre pourtant. Je dois retourner à Karnobat où se trouve un magasin de vélo me dit Ponka après avoir fait le tour des copains par téléphone. Il m’embarque dans sa voiture et nous allons ensemble à la ville chercher une chambre à air avec un autre de ses amis.

Arrêt de bus sauvage

Je reconnais tous les endroits où nous sommes passés hier avec nos vélos. La route semble plus plate en voiture, mais moins savoureuse. Sur le chemin du retour, nous suivons un bus scolaire. L’ami de Ponka qui conduit fait des appels de phare, puis double le bus et s’arrête, feux de détresse allumés. Je me dis que mes acolytes ont dû repérer un soucis sur le bus scolaire. Que nenni ! Du bus sort le petit fils de mon chauffeur qui nous rejoint dans la voiture et tout le monde reprend la route. Je m’amuse à m’imaginer la même scène en France…

Bon, il est maintenant bien plus tard que ce matin et bien qu’encore hésitants, nous choisissons de rester chez Ponka pour le reste de cette journée qui deviendra notre record d’étape la plus courte : 1,6km.

Cheval saboteur

Ponka emmène Estelle et les enfants en balade pendant que je travaille un peu. À leur retour, c’est une Lucie en pleurs et la lèvre en sang que je vois revenir. Estelle la soigne avec les huiles essentielles et ses mains magiques. Ponka est livide. Alors qu’ils donnaient à manger de l’herbe aux chevaux, l’un d’eux s’est mis à courir et est passé au galop à côté de Lucie qui a reçu un coup de sabot en plein visage. Fort heureusement, c’est la toute fin du mouvement qui a percuté notre fille et Estelle est très vite rassurée. Ce n’est pas le cas de Ponka qui a tout de suite appelé une ambulance malgré nous. Lui qui est ambulancier, ce sont ses collègues qui débarquent quelques temps plus tard.

L’infirmière examine Lucie, veut l’emmener à l’hôpital pour faire des radios. Nous ne le voulons pas. Nous savons qu’il faut être très vigilants en cas de choc à la tête, mais je fais entièrement confiance à Estelle. Si elle juge que ce n’est pas nécessaire, ce n’est pas nécessaire. Les ambulanciers repartent sans Lucie qui dormira très bien, ne vomira pas et joue déjà avec le chien dehors.

Un petit verre de schnaps maison ? Volontiers.

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