Le soleil est revenu. Nous chevauchons à nouveau nos montures et c’est reparti.
Dans le petit village de Φυλακτό (Fylakto), nous nous arrêtons devant l’imposante église en espérant y entrer. Elle est close. Mais la porte du café s’ouvre sur un homme qui nous invite à boire un café. Alors nous y allons. Ils sont très sympa ces hommes attablés, ça parle un peu anglais, allemand, grec. Ils nous proposent même de manger quelque chose. Lorsque je demande combien on doit, ils rigolent et nous partons sans avoir sorti notre porte-monnaie.
À Τυχερό (Tychero), nous trouvons à poser la tente dans un pré à côté d’une belle ferme abandonnée. Demain, le chemin sera bien vallonné.
Guet à pédales
L’idée est de rejoindre Αλεξανδρούπολη (Alexandroupoli) sans emprunter les bien trop grosses routes. Nous les longeons, les croisons, mais les évitons. Il va être l’heure de manger, nous allons nous arrêter avant de franchir la rivière.
Aïe ! Pas de pont. C’est un guet. Et vu les précipitations de ces derniers jours, ça risque d’être compliqué. Le courant est trop fort, c’est hors de question de passer avec nos gros vélos… que faire ? Mangeons, nous verrons plus tard.

Nous les avions vus ces véhicules avant de manger. Lorsqu’ils repassent ils s’arrêtent. La discussion est entamée en anglais impeccable avec Dimitri. Vassilis et lui installent des panneaux solaires et ils nous proposent de nous faire passer. Gros vélos sur gros camion !
Nous pouvons reprendre nos entrelacs avec l’autoroute, dessus, dessous, à côté. Là où l’autoroute a creusé dans la roche pour simplifier la circulation des véhicules motorisés, nous la dominons, puis la rejoignons, puis la dominons à nouveau. Pas de tout repos.
Thermes clos
Léon est fatigué, nous poussons les vélos dans les côtes et je fais des aller-retours pour aller chercher le sien également. Arrive enfin le moment de la descente vers Λουτρός (Loutros). Nous pensons y dormir cette nuit pour pouvoir atteindre Αλεξανδρούπολη demain matin et prendre le ferry. La descente est magnifique. La végétation change et devient plus maritime. Le paysage est encore bien montagneux et Λουτρός est un village encaissé. Nous nous arrêtons prendre un rafraîchissement au café. Estelle et moi ne le sentons pas trop de dormir ici, nous décidons de poursuivre un peu malgré la fatigue.
C’est une règle chez nous, ça. Lorsque l’un de nous ne le sens pas, nous allons ailleurs.
Personne n’avait spécialement envie d’aller plus loin, mais nous le faisons. Quelques kilomètres plus tard, nous arrivons à une taverne. Il est déjà tard et nous y mangeons avec plaisir. Un groupe de lépidoptériste Britanique accompagné par un professeur du Museum de Sofia fait la synthèse de la journée d’observation. Mais la météo ne leur a manifestement pas permis d’observer le papillon endémique du coin…
L’ambiance est bonne et après un tour de prospection, nous allons poser la tente dans le village de vacances attenant. Il est abandonné. Ce village est construit autour des thermes dont l’eau chaude coule dans un marigot pas très appétissant, mais les enfants ne se laissent pas impressionner. Un magnifique bâtiment de l’époque hellénistique, site archéologique clôturé par de hautes barrières, est la star du coin. Ou plutôt, était.
À ses côtés, les déclinaisons byzantines ou ottomanes, aux solides voûtes, ou modernes, aux portes vitrées cassées, sont ouvertes aux quatre vents et nous avons plaisir à les visiter. L’église orthodoxe à côté de laquelle nous plantons la tente est également ouverte. Tout cela nous intrigue.
Un automobiliste arrive. Il vient prendre son bain d’eau thermale habituel, mais y renonce en nous voyant. En revanche, il nous explique que le lieu est abandonné car les thermes ne sont plus à la mode en Grèce. Alors on attend que ça revienne pour rouvrir un jour peut-être le centre. En attendant, c’est laissé comme ça… Sa grand-mère venait chaque semaine ici pour un bain d’eau thermale, excellent pour la santé, paraît-il.
C’est étrange, cette ressource inestimable abandonnée parce que l’État ou le promoteur n’a plus les moyens ou l’envie de l’entretenir. Les gens du coin auraient tout intérêt à organiser un petit aménagement à leur profit. Cela ne nécessite pas de grands frais, mais cette eau thermale leur serai t bénéfique à tous. Notre automobiliste est obligé de venir avec une grande bassine en plastique pour pouvoir prendre son bain ici. L’utilisation des communs nécessite que l’on s’organise, que l’on s’en occupe.