Tabatskuri

Pas le feu aux lacs

Écrit par Marc pour le .

J’ai profité de notre journée de repos au bord du lac de წალკა (Tsalka) pour écrire un arrangement de la chanson L’auvergnat de Brassens pour chœur. À proximité des toilettes où il y a de l’électricité, assis au sol, l’ordinateur sur les genoux, je peux enfin mettre sur papier (en fait sur ordinateur) les idées que j’ai en tête depuis plusieurs jours voire semaines en roulant.

Estelle a fait écouter la chanson aux enfants l’autre jour et nous nous sommes dit que ce serait sympa de la reprendre. Une idée a germé dans ma tête le lendemain en roulant et depuis, ça tourne en boucle dans ma tête… C’est le deuxième arrangement que j’écris pour chœur depuis notre départ.

Abandonnés par les enfants

Notre prochaine étape est le lac de ტაბაწყური (Tabatskuri). C’est l’endroit préféré de Rebecca en Géorgie, elle y est allée à plusieurs reprises et s’est émerveillée à chaque fois. Mais ce n’est pas si simple que cela. Il y a deux routes possibles depuis Tsalka, l’une de 50km avec des cailloux partout, très compliquée, même en voiture, l’autre est en asphalte mais il faut parcourir 150km. Soit nous y allons en plusieurs jours, soit nous y allons en direct, mais la distance serait trop importante pour faire deux aller-retours en voiture comme les derniers jours.

Nous décidons de mettre le plus possible de bagages dans la voiture, tous les enfants avec Rebecca et les vélos de nos enfants sur le toit. Rebecca ira en voiture par la route longue avec les quatre enfants, Estelle et moi à vélos très allégés par la route courte et chaotique.

Ça fait un petit quelque-chose de laisser partir ses enfants avec quelqu’un d’autre. Quant à Rebecca, elle va devoir s’occuper de quatre enfants, et pas des moindres !

Route de montagne

Une fois chacun sur sa route, Estelle et moi avançons très vite sur la première partie. Les 20 premiers kilomètres sont avalés très facilement. Quasiment sans chargement, nous profitons du calme et de pouvoir discuter sur les routes de cette belle campagne.

Puis arrive le chemin en cailloux. Ça monte raide directement et c’est en effet plutôt impraticable. Alors nous poussons, bien contents de n’être que peu chargés.

Mais que la route est belle. Nous sommes plongés dans des monts enherbés, hors de la circulation des voitures. Des rapaces survolent ces steppes jaunies par le soleil. Au loin, un berger à cheval surveille son immense troupeau. Nous montons, descendons, serpentons, suivant le chemin des bergers et des rangers.

La route nous fait passer un col à 2100m et ce n’est vraiment pas de tout repos. Mais une fois passé, nous n’avons plus qu’à descendre vers le lac que nous découvrons en contrebas. Nous passons à proximité de camps de bergers nomades, ils sont peu nombreux à avoir le droit de conduire leurs troupeaux dans ce parc national. Seul le pastoralisme traditionnel y est autorisé et le droit est transmis de père en fils.

Au bord du lac

Nous retrouvons nos enfants et nos amis qui nous attendent juste au bord du lac dans une forêt de pins où de nombreux espaces sont habitués à recevoir des campeurs ou des barbecues. Nous avons privilégié un place avec une vue magnifique, cela implique que nous sommes plus près d’autres usagers qui peuvent s’avérer fort bruyants ou intrusifs une fois que les bouteilles de tchatcha se sont vidées, alors nous sommes gentiment sur nos gardes, nous prêtant à demi au jeu tout en nous préservant : non merci, pas de tchatcha pour moi, vraiment, vraiment vraiment, non merci, pas de coca-cola pour les enfants VRAIMENT VRAIMENT, voilà, bonne soirée !

Mais la plupart des voisins sont simplement sympathiques et souriants, apportant parfois quelques présents, pastèque ou khatchapuri.

Le vent se lève

Un vent glacial et puissant s’est levé, nous avons besoin de charger nos appareils électriques, besoin aussi de prendre une bonne douche et de laver du lingue. Alors nous allons au village à la recherche d’une petite maison qui pourrait nous accueillir tous les 7. Nous en trouvons une parfaite à prix tout à fait raisonnable. Nous y passons trois nuits, profitant de la cuisinière et du four pour faire de la grande cuisine ! Lasagnes, gratin dauphinois, gâteaux en tous genres…

Puis nous retournons à notre lieu de camping. Le vent étant toujours présent, nous choisissons un lieu plus abrité, même si la vue est moins spectaculaire. Nous attendrons que le vent se calme pour retourner au bord du lac !

La vie avec nos amis

La vie avec Rebecca et ses deux enfants, Bluejay et Journey est d’une simplicité évidente. Parfois, des tensions entre les enfants éclatent qui trouvent rapidement des dénouements heureux. Nos enfants sont obligés de parler anglais, nous aussi et tout le monde est ravi. Rebecca est habituée à adapter son niveau de langage en fonction de son interlocuteur alors c’est un vrai plaisir de discuter avec elle.

Les enfants sont super contents de finir les plats préparés par Rebecca pour ses enfants, inhabituels pour eux. Ils profitent également des quelques dessins animés en anglais visionnés dans la tente.

Nous nous sentons tout simplement bien dans cet endroit, en lien avec une nature préservée et puissante, les sommets des anciens volcans, le lac, les animaux. Les journée passent en toute simplicité.

Matériel

Nous en profitons pour faire une commande de matériel, entretien, renouvellement… Mon porte-bagage s’est en effet à nouveau cassé en descendant le chemin caillouteux jusqu’au lac ainsi que ma chaîne. C’est la quatrième fois qu’elle lâche, elle n’est tout simplement pas de bonne qualité.

Mais nous ne trouvons pas ce que nous cherchons en Géorgie et il faut commander sur internet. Nous ne trouvons pas de site qui accepte de livrer en Géorgie ! Alors nous finirons par trouver une adresse en Arménie qui est notre prochaine étape en espérant que tout se passe bien.

En attendant, je retourne au village pour essayer de trouver quelqu’un qui accepte de réparer une fois de plus mon porte-bagage. C’est Arman qui est mon héros du jour. Il manie le poste à souder avec une dextérité remarquable et n’hésite pas à arrêter ce qu’il était en train de faire pour s’occuper de moi.

Un bout d’Arménie

Dans cette région de Géorgie vivent de nombreux Arméniens. Tabatskuri semble en être majoritairement peuplé. Nos traducteurs mobiles ont un nouvel alphabet à afficher.

Un soir, je me fais attraper par un groupe en train de profiter de la soirée au bord du lac alors que je porte les poubelles au conteneur. Difficile de refuser l’invitation, je me joins au groupe et me retrouve avec un verre à la main et une assiette de poisson fraîchement pêché, de khatchapuri, de melon, de pommes de terres, stop !

Et d’un coup, quelques convives se mettent à chanter. Je suis aux anges. J’étais terriblement frustré de ne pas avoir entendu de polyphonie Géorgienne et me voilà en présence de chanteurs d’un chœur réputé qui font la fête avec des amis… Arméniens qui habitent dans le village de l’autre côté de la montagne. Alors je reste, je chante aussi et regrette que le reste de la famille ne soit pas là. Le soleil couchant, un verre de blanc à la main, le chant magnifique des ces chanteurs chevronnés, j’ai du mal à les quitter.

Nous sommes restés une dizaine de jours au bord de ce lac magnifique et paisible ainsi que dans ce village de montagne qui n’a pas encore été défiguré par le tourisme, où est pratiquée une agriculture de subsistance, familiale et où la solidarité semble être le mode de vie naturel.

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