Quelques kilomètres de douce montée encore. Nous roulons sous un beau soleil, entourés de monts de pâture. Puis vient le sommet et la descente vers la frontière. Nous n’avons pas envie de quitter l’Arménie, pas si tôt. Nous n’y sommes restés qu’un petit mois et aimerions découvrir encore, rencontrer toujours. Ce n’est pas ce qui se passe. Nous dégringolons entre les montagnes qui s’élèvent petit à petit autour de nous et voilà la frontière. Un petit poste de frontière, pas de longue queue de véhicule.
Quelques vérifications sur nos sacs pour l’entrée en Géorgie, le douanier qui me demande si on est vraiment français à 100%, cela semble important pour lui. Je ne me lance pas dans la discussion mais lui assure qu’on est bien de bons français de souche à 100% voire même à 120%, mais quand même, c’est bien la biodiversité, au revoir et merci. Je pense à tous les immigrants Géorgiens qui vivent en France et leur envoie tout mon amour.
Montagnes et bois
Je ne m’attendais pas à descendre autant ! Nous sommes dans un défilé de montagnes au milieu des bois, nous traversons de petits villages charmants. Je me réjouis de faire la route dans ce sens. Elle est bien calme la route et cela ajoute à son charme.
Une pause repas au bord d’un chemin qui part, la police des frontières qui vient vérifier que nous n’allons pas escalader la montagne à travers les bois avec nos vélos pour repasser en Arménie et c’est reparti pour la dégringolade. Le temps est radieux, nous sommes enivrés par cet environnement paisible de forêts et de sommets.
Quelques kilomètres encore et nous nous engageons dans un chemin pour monter le camp au bord de la rivière dans une belle clairière. Elle nous offre une magnifique omelette de champignons des prés : macrolépiotes, têtes de moines, marasmes des oréades, coprins chevelus, pieds bleus… miam ! C’est bien la biodiversité quand même.
Nous sommes si bien ici que nous y restons le lendemain. Balade dans les bois, au bord de la rivière, entretien du matériel. En parlant de ça, notre réchaud fuit, il ne chauffe plus grand chose et brûle nos culs de casseroles. C’est vraiment problématique car on l’utilise intensivement et on l’aime bien notre réchaud !
Nos ancêtres les Gaulois
La suite passe par დმანისი (Dmanisi) qui est coiffée d’une forteresse impressionnante. Nous y grimpons pour une visite extraordinaire.
La forteresse est vraiment imposante et en marchant sur ses ruines, je penses à toutes les normes de sécurité en France… Ici, si tu tombes, tu meures, a minima, mais on ne va pas mettre des barrières partout, débrouille-toi. L’église est magnifique aussi.
Et puis il y a Zezva et Mzia. Les fouilles faites ici ont permis de mettre à jour des fossiles du genre Homo datant de 1,8 millions d’années, les archéologues les ont nommés ainsi. Cela fait d’Homo georgicus le premier représentant du genre humain hors Afrique. La découverte de ces ossements bouleverse la chronologie établie jusque là puisque la présence d’hominidés en Europe remontait à environ 800000 ans auparavant.
La tente se monte un peu plus bas en bord de rivière à proximité d’abris où des groupes de personnes mangent. Lorsque nous préparons le repas, nos voisins éphémères nous apportent un peu de nourriture. C’est toujours aussi incroyable.
Rouler sur l’or
Le lendemain, notre itinéraire nous fait passer à côté de la mine d’or de საყდრისი (Sakdrisi), la route et ses alentours sont couverts de poussière et les gros camions roulent vite. Beaucoup de noyers bordant la route sont morts ou en mauvais point.
En visitant le musée de ბოლნისი (Bolnisi) le lendemain, nous découvrirons que cette mine d’or était exploitée dès la préhistoire. Les archéologues ont reproduit les gestes et les techniques d’antan et c’est impressionnant à voir en capsules vidéos lors de la visite de ce petit musée remarquable.
Qui sifflent sur nos têtes ?
À Bolnisi, nous trouvons un premier lieu dans lequel nous pensons possible un bivouac. Pas complètement convaincus, mais ça semble possible. Estelle pense aux serpents en arrivant ici.
Nous trouvons un lieu qui semble propice. Une voiture arrive, s’arrête à 150m, des coups de feu en sortent par la fenêtre ouverte ! Les occupants sortent et se dirigent vers un point, puis tirent à nouveau. Ils viennent ensuite vers nous et nous disent qu’il y a de gros serpents ici, que c’est dangereux. Nous n’avons pas spécialement peur des serpents, en tout cas, moins que des armes à feu, mais comme nous ne sentons pas vraiment le lieu, nous décidons de le quitter. Les chasseurs nous indiquent un lieu en bord de rivière et c’est un très bon plan.
Casses et réparations
Notre réchaud est percé. Alors que nous sommes à la station service, mon vélo tombe et un montant de notre étendage en bois se casse. Aïe, c’est la période du matériel qui casse !
Nous nous arrêtons sur un parking, je demande aux gens où je pourrais trouver un soudeur pour le réchaud. Un taxi s’arrête, Giorgi en sort et nous interroge sur notre voyage, il est ébahi. Il voit que je peine avec mon étendage et m’embarque dans son taxi, m’emmène chez lui. Passionné de mécanique, il retape une belle vieille moto et son sidecar, son atelier me fait penser à mon oncle Pierre qui partage également cette passion. Nous trouvons un tasseau de bois. Je parle un peu italien avec sa femme qui le parle bien mieux que moi, inattendu !
De retour aux vélos, Giorgi et ses copains se mettent autour du vélo et m’aident à réparer l’étendage. Puis il m’accompagne chez son copain soudeur qui lâche ce qu’il est en train de faire et s’occupe de notre réchaud. Non seulement je ne peux pas payer quoique ce soit, mais je me retrouve avec du raisin en prime.
Le soir, un des copains de Giorgi nous retrouve à la rivière et nous apporte des fruits, du fromage, du pain, du poisson, des sucreries, du miel, du vin et de la tchatcha. Une fois de plus éberlués par ces brèves rencontres et cette grande générosité…